Différences entre les versions de « Addictions : opiacés »
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Version du 9 novembre 2015 à 11:33
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Définition
Comment définir la dépendance aux opiacés ?
Définition du DSM-IV
A) Mode d’utilisation inadéquat d’une substance conduisant à une altération du fonctionnement ou à une souffrance cliniquement significative, caractérisée par la présence d’au moins une des manifestations suivantes au cours d’une période de 12 mois :
1) utilisation répétée d’une substance conduisant à l’incapacité de remplir des obligations majeures, au travail, à l’école ou à la maison (par exemple : absences répétées ou mauvaises performances au travail du fait de l’utilisation de la substance, absences, exclusions temporaires ou définitives de l’école, négligence des enfants ou des tâches ménagères) ;
2) utilisation répétée d’une substance dans des situations où cela peut être physiquement dangereux (par exemple : conduite de véhicules ou mise en fonctionnement de machines alors que l’on est sous l’influence d’une substance) ;
3) problèmes judiciaires répétés liés à l’utilisation d’une substance (par exemple : arrestations pour comportement anormal en rapport avec l’utilisation de la substance) ;
4) utilisation de la substance malgré des problèmes interpersonnels ou sociaux, persistants ou récurrents, causés par ou exacerbés par les effets de la substance (par exemple : disputes avec le conjoint à propos des conséquences de l’intoxication, bagarres).
Niveau de preuve : accord professionnel
Réglementation
Le constat actuel est un large accès à la BHD et un accès plus limité à la méthadone. Le choix thérapeutique est plus contraint par le cadre réglementaire que par un choix médical. Le cadre réglementaire a accompagné la mise en place de la politique de substitution. Au bout de dix ans, il a donné les preuves de son efficacité, mais il est marqué par un certain nombre d’insuffisances. Ce cadre pourrait être amélioré, ce qui conduit à faire les propositions suivantes.
Niveau de preuve : accord professionnel
Information du patient
Quelles informations donner à un patient pouvant bénéficier d’un traitement substitutif aux opiacés?
Information du patient
Une présentation simple, claire et précise du TSO (un traitement de relativement longue durée, qui vise à supprimer non seulement le manque, mais l’appétence, qui doit être distingué du sevrage, et dont on peut envisager l’arrêt à plus ou moins long terme) doit être faite. La discussion porte sur :
- le partage des connaissances sur les TSO, la négociation et la définition du cadre de prise en charge, le début de l’alliance thérapeutique ;
- la définition des droits, obligations et responsabilités de chacun ; l’ensemble du dispositif local (CSST, réseau, structures sociales, centres d’hébergement, couverture sociale, etc.) ;
- le choix conjoint du pharmacien (binôme minimum), avec lequel le médecin prend contact.
L’information porte également sur :
- les effets des MSO et les risques encourus en cas de prise d’autres traitements édicamenteux (BZD notamment) ;
- les risques encourus en cas de persistance de pratiques à risque (seringues partagées, etc.) ;
- la conduite à tenir en cas d’accident (surdose opiacée par association méthadone/héroïne ; risque de sevrage brutal par association héroïne/BHD, etc.) ;
- la grossesse (sous TSO, les femmes retrouvent une fertilité qui avait été réduite par l’héroïne) et les risques pour le nouveau-né ;
- le risque mortel pour les enfants en cas d’absorption même minime de sirop de méthadone : alerter le patient sur ce point ;
- certains effets secondaires (par exemple, sueurs avec la méthadone) ;
- la conduite automobile et l’exercice d’emplois à risque en cas de prise de MSO.
Niveau de preuve : accord professionnel
Substitution
Comment prendre en charge un toxicomane lors de la première consultation?
Les premières consultations permettent de :
- repérer les conduites addictives présentes et passées (alcool, substances psycho-actives, médicaments) et les prises de risques particuliers ;
- recueillir les antécédents médico-psychologiques personnels (en particulier, intoxications aiguës et surdoses par opiacés et autres produits, sevrages antérieurs, infections, traumatismes) et familiaux (en particulier alcoolisme, addictions, problèmes psychiatriques) ;
- évaluer les antécédents et le risque suicidaire actuel ;
- préciser le statut socioprofessionnel, le niveau éducationnel, le statut familial, la couverture sociale ;
- recueillir les antécédents d’incarcérations liées à l’usage de substances psycho-actives ;
- noter les données de l’examen clinique, qui se doit d’être méticuleux, et des bilans sérologique et biologique, à moduler en fonction des antécédents et des prises de risque antérieures (sérologies VIH, VHB, VHC, transaminases, hémogramme, etc.) ;
- pratiquer un ECG.
Niveau de preuve : accord professionnel
Comment initialiser un traitement par la buprénorphine?
Principales contre-indications :
- patients de moins de 15 ans ;
- nsuffisance respiratoire grave ;
- nsuffisance hépatique sévère ;
- intoxication alcoolique aiguë, delirium tremens.
Dose initiale : 4 mg à 8 mg/j au vu des pratiques professionnelles (doses supérieures à celles de l’AMM, qui justifient d’être validées par des études cliniques spécifiques), augmentation de 1 à 2 mg par paliers de 1 à 3 jours jusqu’à la dose optimale.
Prise quotidienne, unique, sublinguale à rappeler par le pharmacien (laisser fondre sous la langue 8 à 10 minutes sans sucer ; goût amer expliquant la difficulté d’utilisation).
Durée de prescription : 28 jours.
Mais, le traitement initial est prescrit pour 1 ou 2 jours, avec délivrance quotidienne, ce qui nécessite la collaboration du pharmacien. Choisi par le patient, il doit être contacté par le prescripteur, par téléphone, devant le patient, avant toute prescription et doit s’engager sur les conditions de délivrance. Ses coordonnées seront inscrites sur l’ordonnance sécurisée. Les contacts entre prescripteur et pharmacien doivent être réguliers. La rédaction de l’ordonnance est l’occasion de vérifier que le patient a bien compris les explications données.
Si la coprescription de BZD est nécessaire, la limiter également à 2 jours ; proscrire la coprescription de flunitrazépam ou de clorazépate dipotassique souvent utilisés comme produits de « défonce. »
Informer du risque de déclenchement d’un état de manque du fait des propriétés antagonistes de la buprénorphine. L’expérience invite à respecter un délai d’au moins 24 heures entre la dernière prise d’opiacés et la première prise de BHD (délai supérieur à celui de l’AMM).
Niveau de preuve : accord professionnel
Comment initialiser un traitement par la méthadone?
La méthadone est particulièrement indiquée en cas de :
- dépendance sévère ;
- difficultés à renoncer à l’injection ;
- pathologie psychiatrique associée, notamment les troubles anxieux sévères ;
- polyconsommations (alcool, BZD, cocaïne, etc .)
- patients dépendants des opiacés pour lesquels un traitement antalgique morphinique est nécessaire (100 mg de méthadone équivalent à 400 à 500 mg de morphine orale), à réserver au milieu hospitalier.
Principales contre-indications :
- patients de moins de 15 ans ;
- insuffisance respiratoire grave.
La dose initiale de méthadone est établie en fonction :
- de l’évaluation quantitative de la consommation d’opiacés ; - de la fréquence et du mode d’administration de l’héroïne ;
- de la prescription concomitante éventuelle de psychotropes ;
- du bilan des fonctions hépato-rénales.
Dose initiale : 10 à 40 mg/j.
Parmi les conseils de bonnes pratiques, on retient la nécessité de respecter un délai d’environ 24 heures après la dernière prise d’opiacés (10 heures d’après l’AMM) et de commencer un TSO par méthadone plutôt en début de semaine, ce qui permet de faire les contrôles urinaires obligatoires avant le début du traitement, souvent impossibles à réaliser le week-end.
Paliers d’augmentation : 5 à 10 mg maximum par palier de 1 à 3 jours, sans jamais excéder par semaine 50 % de la dose initiale.
Certains auteurs recommandent de garder la dose initiale (sauf si on constate des signes rapides de surdosage) pendant les 3 à 4 premiers jours après le début de traitement. Cette mini-stabilisation permet de mieux mettre en évidence d’éventuels signes de sur ou de sous-dosage.
Prise quotidienne unique, plutôt matinale, par voie orale.
Durée de la première prescription : 7 jours maximum, avec une délivrance quotidienne. Il apparaît nécessaire d’informer de manière très précise les patients sur les signes de surdose opiacée (troubles aigus cardio-respiratoires : insuffisance cardio-respiratoire, signes d’oedème aigu pulmonaire, myosis serré bilatéral) et sur les circonstances de survenue d’une surdose (mauvaise adaptation des doses [rarissime défaillance dans le catabolisme de la méthadone], posologie trop élevée, et surtout mélange avec d’autres médicaments dépresseurs du système nerveux central [surtout BZD]).
Les variations individuelles de la pharmacocinétique peuvent nécessiter de pratiquer des dosages plasmatiques.
La présence d’alcool dans le soluté de méthadone est un problème chez des patients totalement abstinents d’alcool après sevrage et en cas d’association avec des médicaments à effet antabuse (par exemple, métronidazole). Chez le patient diabétique, il faut tenir compte de l’apport de sucre dans le sirop de méthadone (équivalent d’un à deux morceaux selon le flacon).
Niveau de preuve : accord professionnel
Une ordonnance de méthadone doit-elle être obligatoirement manuscrite ?
Non, mais des règles de prescription très strictes sont à respecter
Comme pour tout médicament classé comme stupéfiant ou soumis à la réglementation des stupéfiants, la prescription doit indiquer en toutes lettres le nombre d'unités thérapeutiques par prise, le nombre de prises et le dosage.
En ce qui concerne la méthadone :
– Durée maximale de prescription : 14 jours
– Mention obligatoire du nom du pharmacien sur la prescription
– Délivrance fractionnée par périodes de 7 jours sauf mention expresse du prescripteur « délivrance en une seule fois »
– Risque de décès par surdose : dose léthale 1 mg/kg chez un sujet naïf aux opiacés
Forme sirop.
– La prescription doit être initiée en établissement de santé ou en centre de soins spécialisé. Le relais peut être assuré en médecine de ville.
– Il y a suspicion de mésusage si la posologie est supérieure à 140 mg/j.
Gélule
– Prescription initiale semestrielle réservée aux médecins exerçant en centre de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) ou dans des services spécialisés dans les soins aux toxicomanes.
– Ne doit être utilisée qu'en relais de la forme sirop chez des patients ainsi traités depuis au moins 1 an et stabilisés.
– Protocole de soins obligatoire établi par le médecin traitant indiquant que le patient est traité par sirop depuis au moins 1 an et stabilisé.
Références :
Mots clés : Addiction - substitution - méthadone
Qualité de la preuve = données réglementaires
Y a-t-il un délai à respecter entre la prescription de méthadone par le médecin et sa délivrance par le pharmacien ?
La quantité de produit délivrée doit correspondre à la durée indiquée décomptée à partir du jour de la prescription.
L'ordonnance comportant une prescription de méthadone ne peut être exécutée dans sa totalité ou pour la totalité de la fraction de traitement que si elle est présentée au pharmacien dans les trois jours suivant sa date d'établissement ou suivant la fin de la fraction précédente ; si elle est présentée au-delà de ce délai, elle ne peut être exécutée que pour la durée de la prescription ou de la fraction de traitement restant à courir.
Référence: Article R5132-33 de la santé publique
Mots clés : Addiction - substitution - méthadone
Qualité de la preuve = données réglementaires
Quand et comment arrêter un traitement substitutif aux opiacés?
La demande d’arrêt du TSO ne peut, en dehors de circonstances exceptionnelles, venir que du patient lui-même.
La demande d’arrêt est brutale : le sujet veut interrompre rapidement un traitement :
- pour la BHD, l’arrêt brutal génère un syndrome de manque plus ou moins sévère. Le sevrage sera réalisé en milieu hospitalier ou non, avec un traitement symptomatique (antihypertenseurs centraux, BZD, hypnotiques) ;
- pour la méthadone, aucun auteur n’envisage de sevrage rapide pour des posologies fortes. Le sevrage est conduit en milieu hospitalier, avec un traitement symptomatique : antihypertenseurs centraux, alphabloquants, voire autres opiacés (BHD ou dyhydrocodéine), BZD et hypnotiques.
La demande d’arrêt du traitement se situe dans un contexte plus favorable : sevrage progressif de BHD : en ambulatoire, diminution progressive des doses, par exemple de 1 mg à 2 mg, par paliers de 2 à 7 jours, ou/puis prises 1 jour sur 2 ; sevrage progressif de méthadone :
- très lentement, par paliers de 5 à 10 mg, d’autant plus lentement que la dose est plus faible, à la demande du patient, puis 1 jour sur 2, voire 1 jour sur 3, puis arrêt,
- ou dilution progressive du sirop de méthadone.
Une dernière modalité, non exceptionnelle, d’arrêt est le changement de molécule : il est recommandé de diminuer progressivement la posologie du médicament que l’on souhaite arrêter avant de changer de molécule ; le passage de la méthadone à la BHD requiert une réduction de la dose au moins jusqu’à 30 mg et un intervalle libre d’au moins 24 heures entre la dernière prise de méthadone et la première prise de BHD ; le passage de la BHD vers la méthadone requiert lui aussi un intervalle libre, d’une durée un peu moindre (16 heures peuvent suffire).
Niveau de preuve : accord professionnel
Une prescription de sulfate de morphine est-elle possible dans le cadre d’un traitement de substitution ?
A titre tout à fait exceptionnel et en respectant des règles spécifiques.
Dans les seuls cas où une nécessité thérapeutique l'impose – contre-indications et inadaptation des traitements à la méthadone et à la buprénorphine haut dosage aux besoins des patient - une prescription de sulfate de morphine ne peut être faite qu’à titre exceptionnel après accord du médecin conseil avec le médecin traitant. Le médecin doit alors mentionner de manière manuscrite sur l’ordonnance sécurisée « concertation avec le médecin conseil ». La délivrance ne peut être effectuée par le pharmacien que si cette mention « concertation avec le médecin conseil » a été apposée sur l’ordonnance sécurisée.
Mots clés : addiction – substitution – morphine.
Qualité de la preuve = données réglementaires