Asthme de l'enfant de moins de 36 mois
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Diagnostic
Quand parler d'asthme chez le nourrisson ?
Il n’existe pas de définition consensuelle de l’asthme du nourrisson et du jeune enfant dans la littérature internationale. La proposition des experts français est la suivante :
- La définition de l’asthme est clinique.
- L'asthme de l’enfant de moins de 36 mois est défini comme tout épisode dyspnéique avec râles sibilants, qui s’est produit au moins trois fois depuis la naissance et cela quels que soient l'âge de début, la cause déclenchante, l'existence ou non d'une atopie (Le tableau clinique habituel des épisodes aigus se superpose à celui de la bronchiolite classique.'C’est la répétition qui permet de définir l’asthme.)
- Ces épisodes de sifflements sont discontinus, avec des périodes pendant lesquelles l’enfant est asymptomatique.
- D’autres tableaux cliniques doivent faire évoquer un asthme : toux induite par l’exercice, toux nocturne, toux chronique ou récidivante, toux persistant après une bronchiolite, sifflements persistants ( Le nourrisson présentant des sifflements persistants ou « happy wheezer » a des sifflements permanents sans retentissement sur l’état général ni sur l’activité, sans toux ni dyspnée en intercritique.).
- Cette définition large est nécessaire pour éviter le sous-diagnostic et par conséquent le sous- traitement. Poser le diagnostic d’asthme suppose d’avoir évoqué et éliminé les principaux diagnostics différentiels.
Qualité de la preuve : accord professionnel.
Quelle doit être la démarche diagnostique ?
Le diagnostic d’asthme de l’enfant de moins de 36 mois est essentiellement clinique. Il n’existe pas d’outil diagnostique spécifique en routine : il est évoqué sur l’anamnèse, l’étude du carnet de santé, l’examen clinique et une radiographie de thorax normale en période intercritique.
Sont en faveur du diagnostic d’asthme la présence des signes suivants :
- la répétition d’épisodes de toux et de sifflements (≥ 3), souvent favorisés par les infections virales, les irritants en particulier le tabagisme dans l’environnement, l’exercice ou les émotions ;
- la prédominance nocturne des symptômes;
- la normalité de l’examen clinique entre les crises, et l’absence de retentissement sur la courbe staturo-pondérale.
- La présence de signes d’atopie personnels (eczéma atopique, rhinite allergique, allergie alimentaire) et familiaux (asthme, rhinite allergique et eczéma aopique chez les parents et/ou dans la fratrie) renforce la présomption d’asthme. Cependant leur absence ne doit pas faire renoncer au diagnostic.
La radiographie de thorax de face est indispensable dans la démarche diagnostique de l’asthme de l’enfant de moins de 36 mois. Elle permet d’éliminer des diagnostics différentiels importants tels que les malformations et l’inhalation de corps étranger. Elle sera réalisée au mieux en inspiration (au début d’un pleur) et en expiration (à la fin d’un pleur).
L’efficacité d’un traitement antiasthmatique d’épreuve renforce le diagnostic :
- dans tous les cas les bêta-2 mimétiques de courte durée d’action (B2CA) seront prescrits à la demande pendant 7 à 15 jours à la dose de 200 μg 3 à 4 fois par jour ;
- lorsqu’ils sont indiqués, les corticostéroïdes inhalés (CSI) seront prescrits pendant 2 à 3 mois (cf. fig. 2).
L’efficacité doit être évaluée sur l’amélioration de la toux et/ou des sifflements et/ou de la dyspnée. Cependant l’efficacité peut être incomplète ou inconstante en particulier chez les plus jeunes, sans pour autant éliminer le diagnostic d’asthme.
Qualité de la preuve : accord professionnel.
Faut-il réaliser une enquête allergologique ?
Elle doit être réservée aux enfants de moins de 36 mois qui ont des symptômes respiratoires :
- persistants malgré le traitement de fond,
- et/ou sévères,
- et/ou nécessitant un traitement continu,
- et/ou associés à des symptômes extra-respiratoires compatibles avec une origine allergique,
- et/ou en cas d’antécédent allergique marqué chez les parents ou la fratrie.
Les prick-tests sont recommandés en première intention dans le bilan allergologique.
Les tests multiallergéniques (TMA) à réponse globale (phadiatop, phadiatop nourrisson, alatop par exemple) incluant chez le nourrisson un TMA vis-à-vis des trophallergènes (trophatop enfant 1, 2 et 3) sont indiqués en première intention en l'absence de possibilité de réaliser des prick-tests. En cas de positivité, l’enquête allergologique doit être poursuivie (grade C). Les TMA à réponse spécifique n'ont pas d'indication chez l'enfant de moins de 36 mois.
Il est recommandé de ne pas pratiquer le dosage des IgE sériques totales ou spécifiques d’un pneumallergène en pratique courante en première intention.
Qualité de la preuve : Grade C.
Quels sont les diagnostics différentiels ?
Diagnostics différentiels de l’asthme en fonction des symptômes cliniques et examens complémentaires de première intention, modifié d’après la BTS 2007.
Quand demander un avis spécialisé ?
Le groupe de travail recommande de prendre un avis spécialisé pour confirmer le diagnostic et/ou procéder à des examens complémentaires spécialisés (cf. figure 1) en cas de :
- échec d’un traitement d’épreuve bien conduit ; - formes sévères ou inhabituelles :
- signe atypique évoquant un diagnostic différentiel :
* stridor, * persistance de symptômes respiratoires (toux, encombrement, sifflements, dyspnée) entre les épisodes aigus, * cassure de la courbe staturo-pondérale, * anomalie radiologique,
- signes extrarespiratoires associés (souffle cardiaque, etc.).
Qualité de la preuve : accord professionnel.
Comment coter la sévérité de l'asthme de l'enfant ?
Le groupe de travail propose de classer la sévérité de l’asthme avant traitement selon les paramètres décrits dans tableau 1 :
- le paramètre le plus sévère définit le niveau de sévérité (intermittent, persistant léger à modéré, persistant sévère, intermittent sévère) ;
- la fréquence des symptômes est évaluée sur les 4 dernières semaines et celle des exacerbations sur les 6 ou 12 derniers mois.
En pratique, deux points sont importants à apprécier :
- la fréquence des exacerbations
- et l’absence ou la persistance de symptômes intercritiques6 en particulier nocturne.
Qualité de la preuve : accord professionnel.
Quels sont les facteurs aggravants à rechercher systématiquement ?
Les principaux facteurs déclenchants et/ou aggravants identifiés dans les recommandations sont :
- avant tout les infections virales (favorisées par le mode de garde en crèche ou collectivité) ;
- les allergènes respiratoires et alimentaires ;
- l’exercice, les émotions (rires, pleurs, excitation, etc.) ;
- les pathologies ORL (infection, rhinite) ;
- la pollution intérieure (tabac essentiellement et composés organiques volatiles) et extérieure ;
- le reflux gastro-oesophagien (RGO) ;
- des conditions socio-économiques défavorables.
Qualité de la preuve: accord professionnel.
Traitement
Quels sont les médicaments indiqués ?
Les CSI sont les médicaments essentiels dans le traitement de fond de l’asthme (grade A) à partir du stade persistant léger à modéré : les posologies, modalités d’administration et durées de traitement doivent être particulièrement bien suivies chez l’enfant de mois de 36 mois.
Les B2CA sont essentiellement utilisés pour le traitement des symptômes. Cependant ils peuvent être utiles en traitement de fond, en association avec les corticostéroïdes inhalés.
Les bêta-2 mimétiques de longue durée d’action ne sont pas recommandés chez le nourrisson (absence d’étude).
Le cromoglycate de sodium n’a plus sa place dans le traitement de l’asthme.
La corticothérapie par voie générale n’a pas de place dans le traitement de fond. Elle n’est indiquée que dans le traitement des exacerbations.
Classes des médicaments et formes galéniques disponibles en France en 2008
• Les bêta-2 mimétiques de courte durée d’action (B2CA) : salbutamol administré en aérosol- doseur dans une chambre d’inhalation (100 μg par bouffée) ou en nébulisation (1,25 mg/2,5 ml et 2,5 mg/2,5 ml) ou terbutaline en nébulisation (5 mg/2 ml). Il n’y a pas de limite d’âge inférieur à leur utilisation.
• Les corticostéroïdesinhalés (CSI) ayant une AMM chez le nourrisson sont la fluticasone (forme en aérosol-doseur (AD) 50 μg, à partir de 1 an), le budésonide (formes AD 100 et 200 μg, formes nébulisées 0,5 et 1 mg), la béclométasone en aérosol-doseur (AD 50 et 250 μg) et nébulisée (formes 0,4 et 0,8 mg). Deux modalités d’administration sont recommandées : l’aérosol-doseur avec chambre d’inhalation adaptée (avec masque facial) et la nébulisation avec un générateur pneumatique.
• Lesbêta-2 mimétiques de longue durée d’action (B2LA) n’ont l’AMM qu’à partir de 4 ans.
• Les antagonistes des récepteurs aux leucotriènes n’ont pas de forme galénique disponible en France en 2008 pour l’enfant de moins de 36 mois.
• Le cromoglycate de sodium (nébulisation20mg/2ml).
• Les corticostéroïdesoraux.
Médicaments recommandés dans la stratégie thérapeutique • Les CSI sont les médicaments essentiels dans le traitement de fond de l’asthme (grade A) à partir du stade persistant léger à modéré : les posologies, modalités d’administration et durées de traitement doivent être particulièrement bien suivies chez l’enfant de mois de 36 mois.
• Les B2CA sont essentiellement utilisés pour le traitement des symptômes. Cependant ils peuvent être utiles en traitement de fond, en association avec les corticostéroïdes inhalés.
• Les bêta-2 mimétiques de longue durée d’action ne sont pas recommandés chez le nourrisson (absence d’étude).
• Le cromoglycate de sodium n’a plus sa place dans le traitement de l’asthme.
• La corticothérapie par voie générale n’a pas de place dans le traitement de fond. Elle n’est indiquée que dans le traitement des exacerbations.
Les études d’efficacité des CSI conduisent à proposer des doses « faibles », « moyennes » et « fortes » pour l’enfant. Le groupe de travail propose d’utiliser pour l’enfant de moins de 36 mois les recommandations existantes.
Qualité de la preuve : grade A
Quelle stratégie thérapeutique mettre en oeuvre
Stratégie médicamenteuse initiale
Les paramètres à prendre en compte pour débuter le traitement sont la sévérité initiale évaluée sur les critères cliniques et évolutifs permettant la classification en asthme intermittent, persistant léger à modéré, persistant sévère ou intermittent sévère (tableau 1). La stratégie thérapeutique est décrite dans la figure 2.
Lorsqu’un traitement de fond par corticostéroïdes inhalés (CSI) est instauré il doit être poursuivi au moins 3 mois. La nébulisation n’est pas indiquée en première intention.
Qualité de la preuve : Grade A.
Quelles sont les mesures de l'environnement et les mesures associées ?
- Dans tous les cas l’exposition au tabac est formellement déconseillée (grade B) : une information et une aide au sevrage tabagique doivent être proposées à l’entourage. Il est recommandé d’éviter l’exposition aux autres irritants.
- Aucune conclusion définitive ne peut être dégagée des études actuelles de prévention secondaire chez l’enfant de moins de 36 mois asthmatique non sensibilisé.
- Chez l’enfant de moins de 36 mois asthmatique sensibilisé, il est recommandé de réduire l’exposition aux allergènes identifiés et d’éviter l’exposition aux moisissures visibles.
- Les mesures d’hygiène sont recommandées en période d’infection virale saisonnière pour en prévenir la diffusion.
- La vaccination contre la grippe saisonnière fait l’objet d’une recommandation du Haut Conseil de la santé publique en France chez l’enfant asthmatique :
- de 0 à 6mois:vaccination de l’entourage;
- enfant de plus de 6mois :vaccination selon le calendrier vaccinal.
La posologie est de deux demi-doses à un mois d’intervalle pour la primo-vaccination puis une demi-dose/an jusqu’à l’âge de 36 mois.
- Le traitement systématique d’un reflux gastro-œsophagien n’est pas recommandé en l’absence de symptôme digestif évocateur.
Qualité de la preuve : accord professionnel.
Quels sont les critères indiquant un contrôle de l'asthme ?
Le groupe de travail propose de retenir comme critères de contrôle total :
- l’absence de symptôme diurne et nocturne ;
- l’absence de recours aux bronchodilatateurs de courte durée d’action ;
- une activité physique normale ;
- pas d’absentéisme (de la crèche ou du travail pour les parents) ;
-l’absence de recours aux soins pour asthme.
Cependant en tenant compte de la variabilité saisonnière de l’asthme de l’enfant et du nourrisson, le groupe de travail propose, en accord avec le NHLBI9, d’accepter dans les critères de bon contrôle la survenue d’une exacerbation dans l’année.
Qualité de la preuve : accord professionnel.
Comment adapter la stratégies thérapeutique en fonction du contrôle ?
Stratégie médicamenteuse pour obtenir le contrôle
L’objectif est d’obtenir le contrôle total de l’asthme avec la dose minimale efficace de corticostéroïdes inhalés pour en éviter les effets secondaires. Cependant un contrôle partiel peut être toléré en fonction du rapport bénéfice/risque : charge thérapeutique (effets secondaires et contraintes du traitement) versus symptômes résiduels.
- La stratégie thérapeutique est décrite dans la figure 3.
La diminution des doses sera envisagée après un contrôle maintenu pendant 3 à 6 mois.
En cas de non-contrôle après 2 à 3 mois, il faut augmenter la pression thérapeutique d’un palier. L’instauration d’un traitement de fond par nébulisation est du ressort du spécialiste.
Qualité de la preuve : accord professionnel.
Stratégie de réduction de la pression thérapeutique quand le contrôle est obtenu Les recommandations reposent sur un accord professionnel.
- La stratégie doit prendre en compte la perception du contrôle par les parents et par le médecin, le caractère saisonnier de l’asthme (infections virales, charge allergénique).
- Il est conseillé d’éviter de réduire ou d’arrêter le traitement en période automno-hivernale (infections virales) ou lors de la saison pollinique pour les patients allergiques. Le groupe de travail ne peut pas se prononcer sur la pertinence d’un arrêt du traitement de fond en période estivale.
- La réduction des doses de CSI doit être progressive, tous les 3 à 6 mois, jusqu’à atteindre la dose minimale de CSI permettant de maintenir le contrôle de l’asthme (dose minimale efficace). En fonction de la posologie initiale de CSI, la diminution des doses se fait par paliers de 25 à 50 %, avec pour objectif de maintenir le contrôle total de l’asthme.
- Lors de la décroissance, le passage à une monoprise peut être envisagé pour favoriser l’observance, à l’exception de la béclométasone du fait de ses caractéristiques pharmacologiques.
Qualité de la preuve : accord professionnel.
Stratégie thérapeutique en cas de non-contrôle de l’asthme
- S’assurer qu’il s’agit bien d’un asthme (cf. Annexe 1, tableaux 1.1 et 1.2).
- Rechercher, évaluer et tenter de corriger les facteurs les plus fréquemment associés au non-
contrôle : - mauvaise utilisation des dispositifs d’inhalation; - mauvaise observance du traitement de fond; - connaissance insuffisante de la maladie (pas de reconnaissance par les parents du mauvais contrôle) : adresser si possible les parents à une école de l’asthme ; - pathologie ORL associée; - défaut de contrôle de l’environnement domestique : tabagisme environnemental, polluants chimiques (composés organiques volatiles, aldéhydes et autres), allergènes chez les enfants sensibilisés ;
- Suspicion de refluxgastro-œsophagien : traitement d’épreuve.
- Augmenter la pression thérapeutique (cf. tableau 2): augmentation de la posologie des corticostéroïdes inhalés tous les 2 à 3 mois sans dépasser la dose maximale.
- En cas de persistance du non-contrôle de l’asthme malgré un traitement bien conduit, il est recommandé d’adresser l’enfant au spécialiste pour, en plus des items précédents :
- compléter les examens complémentaires à la recherche d’un diagnostic différentiel ou à la recherche d’un facteur aggravant (pHmétrie par exemple) ;
- évaluer l’importance du terrain allergique:recherche d’un eczéma atopique sévère résistant au traitement, recherche d’une sensibilisation inhabituelle : aliment, blatte, moisissure, animal particulier, etc. (avis d’un allergologue) ;
- optimiser le traitement : décision de nébulisation, choix du couple médicament/système de nébulisation.
Qualité de la preuve : accord professionnel.
Suivi
Quelle doit être la fréquence du suivi ?
Le suivi des asthmatiques est essentiel (grade B). La survenue d’une exacerbation sévère ou la perte de contrôle nécessitent une consultation pour réévaluer le traitement.
Chez le nourrisson dont l’asthme est contrôlé, il est proposé d’adapter l’attitude thérapeutique et la fréquence du suivi :
- en l’absence de CSI, suivi habituel du jeune enfant de moins de 3 ans par le médecin généraliste ou le pédiatre ;
- en cas de traitement par CSI à doses faibles ou moyennes (cf. tableau 2), consultation tous les 3 à 6 mois chez le médecin généraliste ou le pédiatre ;
- en cas de fortes doses, consultation tous les 1 à 3 mois chez le spécialiste.
Qualité de la preuve : accord professionnel.
Quels sont les facteurs pronostiques ?
Les études de cohorte qui avaient un suivi prolongé ont montré que les facteurs pronostiques de persistance et/ou de rechute dans l’enfance étaient :
- l’exposition au tabac dans la petite enfance ;
- la sensibilisation allergénique précoce (avant 3 ans) et persistante aux pneumallergènes domestiques (acariens, chat, chien) ; - la sensibilisation aux trophallergènes ;
- l’atopie parentale ;
- la présence d’une obstruction bronchique et d’une hyperréactivité bronchique aux explorations fonctionnelles respiratoires (si elles sont réalisées) ;
- la fréquence élevée des symptômes respiratoires dans la petite enfance.
Qualité de la preuve : accord professionnel.
Mots-clés: asthme, allergie, nourrisson, enfant